dimanche 4 décembre 2011

L'Immaculée

L’Immaculée :

Cher lecteur, chère lectrice,

J’espère que vous allez bien. J’ai été pas mal silencieux ces jours-ci. Je m’en excuse. J’ai tant de choses dans la tête par les temps qui courent. Mais la bonne nouvelle, c’est que j’ai aussi quelque chose dans le cœur. J’ai à cœur de vous parler, en ce deuxième dimanche de l’Avent, de notre immaculée Mère du ciel : la très Sainte Vierge Marie. Jeudi, nous célébrerons en Église la Solennité de l’Immaculée Conception (le 8 décembre). Je suis toujours étonné de constater que de nombreux catholiques confondent encore l’immaculée conception de la Vierge Marie avec la conception virginale de Jésus. L’Immaculée Conception  regarde Marie, a pour objet la Vierge elle-même. Par une grâce insigne, donnée en vue de la rédemption que Jésus allait opérer, Marie n’a jamais été touchée par le péché. Jamais le péché ne l’a même effleurée. Marie fut conçue Immaculée dans le sein de sa mère : sainte Anne. Marie est la seule créature humaine qui n’a jamais été entachée de la faute originelle de nos premiers parents; Elle est la seule à avoir été épargnée du péché originel. Et Marie n’a jamais commis un péché de toute sa vie. N’est-ce pas extraordinaire ? Cette femme n’a été marquée que par la sainteté. Elle a grandi de grâce en grâce. Seule la grâce a façonné Marie. On ne peut même pas imaginer ce que cela signifie dans les faits. Marie, grandissant de grâce en grâce, a atteint un sommet de sainteté inégalé et qu’on ne pourra vraiment contempler qu’au ciel.

La solennité de l’Immaculée Conception est précédée dans le calendrier liturgique par la fête de la « Médaille Miraculeuse » que l’on célèbre le 27 novembre. Le 27 novembre 1830, la très Sainte Vierge Marie est apparue à celle qui allait devenir « sainte Catherine Labouré », les mains tendues vers le monde, vers nous, et des rayons sortant de ses mains. Dans ces mains tendues, nous pouvons lire toute la sollicitude de Marie envers nous ses enfants et sa prière maternelle en notre faveur. Nous sommes en droit de croire que toute grâce et toute faveur spirituelle nous parviennent par les mains maternelles de Marie. C’est cette attitude de Marie avec ce positionnement des mains que Bernadette a vu à Lourdes, lors de l’apparition du 25 mars 1858 (1). Et c’est dans cette même position que la Vierge est apparue à Rome le 20 janvier 1842 au sceptique qu’était Alphonse Ratisbonne. Catherine Labouré vit alors les mots suivants entourer la Vierge : « Ô Marie conçue sans péché, priez pour nous qui avons recours à vous. » Voilà, exprimé très clairement, le dogme de l’Immaculée Conception, dogme qui ne sera défini que vingt-quatre ans plus tard : le 8 décembre 1854. La Vierge Marie a dit à Catherine Labouré : « Faites frapper une médaille sur ce modèle; les personnes qui la porteront avec confiance recevront de grandes grâces ». Ce fut fait; et ce fut vrai. En très peu de temps, les miracles attribués à cette médaille furent si nombreux qu’on lui donna le nom de « médaille miraculeuse ».

Si un jour vous allez à Paris, je vous encourage à aller à la rue du Bac, à la chapelle des apparitions de la Vierge Marie à sainte Catherine Labouré. C’est un endroit magnifique et tellement paisible. Dès que nous entrons sur le terrain du monastère, dans l’enceinte murée, nous avons l’impression de quitter ce monde qui passe et de rejoindre l’invisible. Sur votre gauche, sculptée dans la pierre, vous pouvez voir diverses scènes représentant la vie de sainte Catherine Labouré. La dernière fresque représente le plus grand des miracles attribués à la médaille miraculeuse : la conversion d’Alphonse Ratisbonne. Cela nous montre que pour l’Église, les plus grands miracles sont les guérisons spirituelles, les conversions.

Alphonse Ratisbonne est né le 1er mai 1814, à Strasbourg, en France. Né de parents juifs, il n’adhère à aucune religion et est résolument athée. Il développe assez tôt une aversion envers la religion catholique. Une fois adulte il admettra qu’il y avait un membre de sa famille qu’il haïssait : son frère Théodore, un peu plus âgé que lui, qui était devenu catholique et, comble de malheurs, s’était fait prêtre. Alphonse était fiancé à une jeune fille de 16 ans qu’il désirait épouser. Ne pouvant se marier immédiatement à cause de l’âge précoce de sa fiancée, Ratisbonne décide de faire un voyage qui le conduirait en Orient. Avant de partir, sa fiancée lui fait promettre de ne pas passer par Rome. Ratisbonne en fait la promesse. Une fois à Naples, Ratisbonne se trompe de train et le voilà en route, bien malgré lui, pour Rome où la Vierge Immaculée l’attendait. Une fois rendu à Rome, Alphonse se met à la recherche d’un des amis de son frère Théodore, le baron Gustave de Buissière qui était un fin connaisseur de l’orient. Par erreur, il est plutôt conduit chez un certain Théodore de Buissière, un catholique convaincu et très apostolique. Monsieur Théodore de Buissière ne mit pas beaucoup de temps à s’apercevoir quel genre de personne était Alphonse Ratisbonne : un libre penseur aux idées très libérales. N’est-il pas étonnant de constater à quel point les « libres penseurs »  sont très souvent « esclaves » de leurs préjugés ? M. de Buissière eut l’audace de demander à Alphonse Ratisbonne de porter à son cou la médaille miraculeuse. Dans un premier temps, Ratisbonne se fâcha à l’idée de poser un geste aussi ridicule mais, la grâce agissant, il accepta et passa la médaille à son cou. Il s’exclama alors, par moquerie : « Me voilà maintenant catholique romain. ». M. de Buissière ne s’arrêta pas là. Il poussa l’audace jusqu’à tendre un bout de papier à Ratisbonne en lui disant : « J’aimerais aussi que vous récitiez à chaque jour cette prière mariale qu’on appelle le Memorare. Je vous prierais de la copier chez vous et de me la remettre car c’est l’unique exemplaire que j’ai. » Ratisbonne se fâcha à nouveau en disant qu’il était temps d’en finir avec ces bêtises. Mais la grâce continuant d’agir, il accepta ce défi supplémentaire. Ce soir-là, Alphonse Ratisbonne alla au théâtre pour se changer les idées. De retour chez lui, en se dévêtant, il prend conscience qu’il porte désormais une médaille à son cou et se souvient de la prière qu’on lui a prêtée. Il s’assit pour transcrire le Memorare. Le lendemain matin, cette prière mariale qui est quand même assez longue et que j’ai toujours personnellement de la difficulté à mémoriser, s’était totalement imprégnée dans l’esprit de Ratisbonne sans que ce dernier soit capable d’en donner la raison.

Quelques jours plus tard, Ratisbonne se trouve sur la place d’Espagne à Rome, dans un café. Au sortir du café, il rencontre M. de Buissière qui l’invite à monter dans sa voiture et lui dit : « Je vais m’arrêter quelques instants à l’église Saint-André delle Fratte car un bon ami est décédé et je dois faire les préparatifs des funérailles. Vous pourrez m’attendre dans la voiture et nous irons passer un moment ensemble par la suite ». Ratisbonne monte dans la voiture. Alors que M. de Buissière est dans l’église, Ratisbonne décide d’aller jeter un coup d’œil dans ce lieu de culte. Plus tard, racontant cette journée mémorable, il écrira que ce jour-là devant l’église, il y avait un chien noir qui bondissait devant lui comme pour l’empêcher d’entrer. Une fois à l’intérieur de l’église, rien d’extraordinaire n’a attiré l’attention du visiteur. Soudain, tout devint sombre et un faisceau de lumière se dirigea vers un autel latéral, situé à l’extrémité opposée de l’endroit où était entré Alphonse Ratisbonne. Ce dernier ne se rappelle pas avoir franchi la distance entre l’entrée et l’autel latéral situé à l’extrémité opposée. Soudain, la Vierge Immaculée lui apparut, dans la même position que la Vierge de la médaille miraculeuse. Seul l’index de sa main droite pointait vers le bas, comme pour indiquer à Ratisbonne de venir s’agenouiller à ses pieds. Alphonse fut complètement bouleversé par cette apparition. Voici un texte écrit de sa main : 

J’étais depuis un instant dans l’église lorsque tout d’un coup, je me suis senti saisi d’un trouble inexprimable ; j’ai levé les yeux, tout l’édifice avait disparu à mes regards. Une seule chapelle avait pour ainsi dire concentré la lumière et au milieu de ce rayonnement parut, debout sur l’autel, grande, brillante, pleine de majesté et de douceur, la Vierge Marie, telle qu’elle est sur ma médaille ; elle m’a fait signe de la main de m’agenouiller, une force irrésistible m’a poussée vers elle, la Vierge a semblé me dire : c’est bien ! Elle ne m’a point parlé, mais j’ai tout compris.»

C’était le 20 janvier 1842. Dans un autre texte, parlant de cette expérience inoubliable, Alphonse Ratisbonne nous dit ceci : « Je la regardai et immédiatement je baissai les yeux, réalisant mon indignité et comprenant intérieurement à quel point le péché originel est quelque chose de grave. J’essayai par la suite de regarder à nouveau le visage de la Vierge mais mes yeux ne pouvaient monter plus haut que ses mains pleines de miséricorde ». (Ces dernières phrases de Ratisbonne, je les cite de mémoire, les ayant lues il y a de cela quelques années). 

Lorsque M. de Buissière sort de la sacristie, il voit Ratisbonne agenouillé et tout en pleurs. Il s’informe et demande ce qui s’est passé. Ratisbonne dit qu’il veut d’abord en parler à un prêtre. M. de Buissière le conduit à l’église du Gesù à Rome où Alphonse rencontre un Père jésuite. Durant quelques jours, Ratisbonne recevra des instructions sur la religion catholique et il admettra que tout ce qu’il a appris sur la religion lui avait déjà été donné comme en germe au moment de l’apparition de la Vierge. Alphonse Ratisbonne fut baptisé à la fin du mois de janvier. Il devint prêtre, entra dans la Compagnie de Jésus et on l’appela dorénavant : le Père Marie. Il alla en Terre Sainte aider son frère Théodore qui avait fondé une Congrégation religieuse dans le but d’aider ses frères et sœurs juifs à se convertir au christianisme. Le Père Marie fut renommé  pour sa joie de vivre et sa gaieté. Il mourut le 6 mai 1884 et voulut être enterré à Aïn-Karim, là où a vécu Élisabeth, la cousine de la Vierge Marie. Le mystère de la Visitation de Marie à Élisabeth est d’ailleurs un des mystères les plus joyeux du rosaire.

O Marie conçue sans péché, priez pour nous qui avons recours à Vous !

Bernadette Soubirous a vu dix-huit fois la Vierge Marie, du 11 février au 16 juillet 1958. À quelques reprises, Bernadette avait demandé à la Dame de lui révéler son nom. Il en a fallu du temps avant que Bernadette ait la réponse à sa question. Ce n’est que lors de la seizième apparition que la Vierge Marie révéla finalement son nom; et un nom tellement surprenant! Cette seizième apparition eut lieu le 25 mars 1858. Il est merveilleux de constater que la Vierge Marie a choisi ce jour pour révéler son nom à Bernadette. Le 25 mars, l'Église a toujours fêté L’Annonciation: l'annonce faite à Marie par l'archange Gabriel. Nous croyons qu’il y a deux mille ans, au départ de l'ange, Marie était enceinte de Jésus. Elle le mettra au monde exactement neuf mois plus tard: le 25 décembre. Voilà pourquoi l'Église a décidé un jour de mettre la solennité de L’Annonciation ou de L’Incarnation, le 25 mars.

Quel nom Marie s’est-elle attribuée le 25 mars 1858? La Vierge Marie dit à Bernadette: "Je suis l'Immaculée Conception ". Ceci est très intéressant car le fondement biblique de la croyance au dogme de l''Immaculée Conception est la deuxième parole de l'ange Gabriel à Marie: " kékaritoménê " mot grec que nous traduisons souvent par "pleine de grâce". À l’Annonciation, l’archange Gabriel a donné un nom nouveau à Marie; il ne l’a pas appelé Myriam mais « kékaritoménê » qui signifie « pleine de grâce ». L’Église a toujours cru que Marie était pleine de grâce dès sa conception, immaculée dès sa conception. Il convenait donc parfaitement que Marie attende le 25 mars pour s’attribuer le nom d’Immaculée Conception. Voici le récit de la seizième apparition de la Vierge Marie à sainte Bernadette Soubirous:
 
 
« La Dame va s'annoncer. La veille de l'Annonciation Bernadette entend l'appel de la Vierge. Oh! douce voix! Cette sainte nuit de l'Incarnation sera une sainte nuit pour Bernadette, une nuit entrecoupée d'Ave Maria. Dès la pointe de l'aube, peu après 5 heures, elle voudrait courir à la Grotte, mais une crise d'asthme l'empêche de courir. Oh! bonté de la Vierge! En descendant vers la Grotte, Bernadette voit la niche déjà illuminée! La Dame l'attend. Une prévenance à n'y pas croire. Bernadette ne voit que Marie, mais pas la foule qui se presse aux abords de la Grotte. Mais laissons Bernadette raconter: "Quand je fus devant elle, je lui ai demandé pardon d'arriver ainsi en retard. Toujours bonne pour moi, elle me fit signe de la tête que je n'avais pas besoin de m'excuser. Alors, je lui exprimai, comme je pus, toutes mes affections, tous mes respects et le bonheur que j'avais de la retrouver. Après l'avoir entretenue de tout ce qui me vint au coeur, je pris mon chapelet. Pendant que j'étais en prière, la pensée de lui demander son nom s'imposa à mon esprit avec une persistance qui me faisait oublier toutes les autres pensées; je craignais de me rendre importune en réitérant une demande toujours demeurée sans réponse, et cependant quelque chose m'obligeait à parler. Enfin, d'un mouvement que je ne pus contenir, les paroles sortirent de mes lèvres et je priai la Dame: "Madame, voulez-vous avoir la bonté de me dire qui vous êtes?" Comme à mes précédentes questions la Dame inclina la tête, sourit, mais ne répondit pas. Je ne sais pourquoi, ce matin-là, je me sentis plus courageuse et je revins à lui demander la grâce de me faire connaître son nom. Elle renouvela son sourire et sa gracieuse salutation et continua de se taire. Alors une troisième fois, les mains jointes, et tout en me déclarant indigne de la faveur que je réclamais, je recommençai ma prière. La Dame se tenait debout au-dessus du rosier. A ma troisième demande, elle prit un air grave et parut s'humilier. Puis elle joignit les mains, les porta à son coeur et regarda le ciel. Enfin, les séparant lentement, comme dans la médaille miraculeuse, et se penchant vers moi, elle me dit, la voix très douce: « Qué soy era Immaculada Councepciou », ce qui, dans le patois de Bernadette, veut dire : " Je suis l'Immaculée Conception."  Bernadette n'a pas compris ce que voulait dire cette expression " Immaculée Conception ". Mais M. le Curé le saura bien. Aussi va-t-elle tout de suite chez lui en répétant sans cesse la parole de la Dame. C'est ainsi que la Vierge s'est révélée d'abord au prêtre par l'intermédiaire de Bernadette. Et la grande nouvelle que c'est l'Immaculée, vraiment Elle, qui a visité la terre, va se répandre partout, par Lourdes, les villages voisins, par la France et le monde entier. Et c'était partout comme la joie de la Visitation. »   (Tiré du site internet suivant : Les apparitions de la Sainte Vierge à Lourdes dieu-sauve.chez-alice.fr/apparitions/lourdes/lourdes.htm)

Dans sa lettre encyclique sur la Vierge Marie, en l’an 1987 (année mariale), le pape Jean-Paul II parle de la surprise de Marie lorsque l’ange Gabriel s’est adressé à elle en l’appelant non pas Myriam mais « kékaritoménê ». Voici les mots du pape :

Le messager divin dit à la Vierge: «Réjouis-toi, pleine de grâce, le Seigneur est avec toi» (Lc 1, 28). Marie «fut toute troublée, et elle se demandait ce que signifiait cette salutation» (Lc 1, 29), ce que pouvaient signifier ces paroles extraordinaires et, en particulier, l'expression «pleine de grâce» (kécharitôménê).    En effet, le messager salue Marie comme «pleine de grâce»: il l'appelle ainsi comme si c'était là son vrai nom. Il ne donne pas à celle à qui il s'adresse son nom propre suivant l'état civil terrestre: Miryam ( = Marie), mais ce nom nouveau: «pleine de grâce». Que signifie ce nom ? Pourquoi l'archange appelle-t-il ainsi la Vierge de Nazareth?  (Redemptoris Mater, Jean-Paul II, 1987, no 8)




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